A la veille du 57ème anniversaire du drame d’Oradour-sur-Glane, Robert Hébras, un des derniers rescapés du massacre d’Oradour-sur-Glane, a reçu la croix de chevalier dans l’ordre de la légion d’honneur des mains de Pierre Mutz, préfet de Région et de la Haute-Vienne. Cette cérémonie a eu lieu dans l’enceinte du Centre de la Mémoire auquel Robert Hébras a activement contribué à la réalisation en tant que président, pendant de nombreuses années de l’Association nationale des familles de martyrs d’Oradour. De ce jour dramatique du 10 juin 1944 où fut détruit Oradour-sur-glane avec son cortège de 642 victimes, Robert Hébras est l’un des cinq hommes qui ont réussi à s’échapper de la grange Laudy. Il avait dix-neuf ans lors de cette journée tragique qui marque désormais à jamais l’histoire de notre pays et la conscience de tout un peuple. Depuis ce jour, Robert Hébras a fait de sa vie un exemple en mémoire de ceux qui sont tombés et un devoir de mémoire auprès des jeunes générations avec lesquelles il n’a de cesse d’éveiller la vigilance. Lors de cet hommage de la république française envers cet homme à la vie hors du commun, le préfet Pierre Mutz dira de ces destins qu’ils sont «exceptionnels, parfois, car les épreuves qu’ils ont traversées en font des symboles de la grandeur, ou des vicissitudes, de l’histoire collective des français. Je crois n’avoir jamais ressenti, comme aujourd’hui, la fragilité des destinées individuelles ballotées par le cours tumultueux de l’histoire».
C’est devant ses proches, sa famille, ses enfants et ses petits-enfants ainsi qu’en présence de nombreuses personnalités comme Marcel Darthout, autre rescapé du massacre d’Oradour, du sénateur et président du Conseil général de la Haute-Vienne, Jean-Claude Peyronnet que Robert Hébras recevait cette haute distinction. Avec une voix étranglée par l’émotion et chargée d’histoire toute intérieure, Robert Hébras déclarait «cette décoration, je la dédie à ma mère, à mes deux soeurs, à toutes les victimes de cette tragédie ainsi qu’à mon père. Je ferais tout pour être digne de cette décoration. Cette journée restera à jamais gravée dans ma mémoire ainsi que les 56 anniversaires que nous avons célébrés».
L’émotion était palpable dans l’assemblée au coeur de cette mémoire faite homme lors de ce discours d’où émanait toute l’humanité et la simplicité de cet homme d’engagement. Un peu plus tard, chaleureux, souriant, il confiera à propos de son travail de mémoire «j’interviens auprès des jeunes pour qu’ils comprennent ce qu’a été Oradour. Dans la vie, il n’y a qu’une chose, la tolérance car la haine est facteur de guerre. Il faut rester vigilant, faire attention. Je suis ému d’avoir reçu une médaille mais ce sont mes camarades qui m’ont sauvé la vie. Ma médaille est pour les miens et ceux qui ont disparu dans le massacre». Lors de son intervention, le préfet de Région Pierre Mutz citera en conclusion quelques mots de Jean Jaurès qui s’appliquent parfaitement à l’engagement de Robert Hébras «On n’enseigne pas ce que l’on sait, on n’enseigne pas ce que l’on veut, on enseigne ce que l’on est».
Aujourd’hui, Robert Hébras après être passé comme il le dit lui-même par une phase de «haine» envers certains hommes, a reconstruit son identité, construit une famille. Il dit sur sa destinée si singulière «J’ai voulu vivre pour me faire honneur et faire honneur aux miens».
Des paroles de sagesse pour un homme marqué par l’histoire et toujours de notre temps.
S.H. l’Echo du Lundi 11 Juin 2001
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