Sept livres complémentaires pour mieux comprendre la guerre de 39-45, l’Occupation allemande, la Résistance française et la libération…
Plus de cinquante ans après, la libération de la France, une abondante floraison d’ouvrage est venue ce printemps favoriser une meilleure compréhension de la guerre de 39-45, de l’Occupation allemande et de la Résistance.
Avec La banquise (1), rude et beau roman écrit sur toile de fond historique, Jean-Pierre Chabrol pose un regard neuf sur une décennie capitale de ce XXème siècle, la période allant de 1936 à 1945. A travers l’étonnant destin d’une “femme indomptable”, comme il les aime et dans un décor cévenol qui lui est tout aussi cher, l’auteur établit volontairement un lien entre les évènements du Front Populaire, la guerre civile espagnole, la montée du nazisme, le conflit de 39/40, l’Occupation allemande, la Résistance et l’intervention des alliés.
Un sang de vérité irrigue cette grande fresque romanesque et lui donne un souffle de vie intense qui facilite l’approche de l’Histoire avec un grand “H”.
Jean-Pierre Chabrol avait quinze ans en 1940, trois ans plus tard il était dans le maquis cévenol avant de poursuivre les Allemands jusqu’en Autriche avec l’armée de Delattre de Tassigny.
On retrouve un peu la même démarche dans le roman de Bertrand Dubreuil, Les yeux de Saul (2), mais en suivant les tribulations d’un jeune garçon qui, comme Chabrol, et beaucoup d’autres à l’époque, se retrouvent confrontés à des choix difficiles et passent sans transition de l’adolescence à l’âge adulte. Cette situation de rupture brutale avec le milieu familial est bien décrite de même que l’aventure courageuse du journaliste à Clermont-Ferrand, sous l’Occupation.
Autre regard, féminin celui-là, avec Les femmes de l’ombre (3) d’Agnès Claverie, journaliste à Sud-Ouest. Là encore, l’atmosphère de l’époque est fidèlement reconstituée autour d’une histoire d’amour et d’une famille bordelaise éclatée.
Le maquis: d’Auvergne en Limousin
A ces versions romanesques viennent s’ajouter des ouvrages consacrés à des récits, témoignages, anecdotes sur la Résistance qui apportent un éclairage plus direct sur le vécu du moment. Lui aussi tombé très tôt dans le chaudron du combat clandestin, Jean Sanitas publie un nouveau livre, Des “terroristes” auvergnats qui savaient se battre et mourir (4).
Cet ouvrage est préfacé par une autre grande figure de la Résistance clermontoise, Edmond Leclanché, qui souligne: “il faut savoir que les résistants étaient tous volontaires en tant que tels, ils ont le respect de la vérité à tout prix“. Avec sa fougue jamais émoussée de grand reporter et de grand résistant, Jean Sanitas s’attache à cette vérité, à travers les exploits et les sacrifices de ses compagnons de l’ombre.
Fils d’un officier FFI de Limoges-Ville, Henry Demay a également consacré plusieurs ouvrages à la Résistance et à l’Occupation en Limousin. Son dernier livre, Ceux du maquis (5), à base de récits et de témoignages, est le vivant reflet d’une région qui a beaucoup donné pour que le pays retrouve sa liberté.
Sous le contrôle de l’association Liberté-Mémoire s’est créée, aux édition du Félin, une nouvelle collection “Résistance, liberté, mémoire”. Après la réédition l’an dernier du livre d’André Postel-Vinay, Un fou s’évade (prix littéraire 1997 de la Résistance), deux nouveaux titres viennent de paraître.
Le premier est une réédition de l’ouvrage jusqu’alors épuisé de Claude Bourdet, L’aventure incertaine. L’auteur, qui est décédé en 1996 et qui fut à l’origine de la création du Nouvel Observateur a été au coeur de la résistance de 1940 à 1945. Son analyse sur les évènements qui se sont succédés durant cette période est un modèle du genre et son livre reste une référence.
Cette observation est valable pour le deuxième titre de cette collection, Le temps des passions (7), qui porte la signature de François Louis Closon, compagnon de la Libération,. Un ouvrage qui décrit notamment les relations de l’auteur avec Jean Moulin et apporte une contradiction irréfutable à ses détracteurs. (1). Ed. Presses de la cité 110F.(2). Ed. L’Harmattan, 120F.(3). Ed. Robert Laffont, 119F.(4). Ed. L’Harmattan.(5). Ed. de la Veytizou, 125F.(6). Ed. du Félin, 149F.
(7). Ed. du Félin, 120F.
Jean-Claude Delaygue, Centre France Dimanche 7 juin 1998
“La grande illusion était à l’écran samedi 16 mai après-midi, salle des spectacles à Magnac-Laval. Mais ce grand classique de Jean Renoir a été vu différemment par les spectateurs qui ont pu entrer dans les coulisses du tournage grâce au témoignage de Mme Navières du Treuil, fille de l’officier du 138e Régiment d’infanterie de Magnac-Laval qui a inspiré le maître cinématographique. Le lieutenant Navières du treuil, qui était originaire de Blond, fut un miraculé de la guerre de 1914-1918 après avoir été enterré vivant.
Son histoire, son vécu, ont fortement séduit un Jean Renoir très friand du détail, à l’image du talent pictural de son père Auguste. Les deux hommes se sont liés d’amitié à Paris, à l’époque de la sortie du film en 1937. La fille du lieutenant n’avait que 11 ans mais ses souvenirs d’enfance sont gravés. Six décennies plus tard, elle en a fait part, sur scène, aux spectateurs magnachons. Elle revoit très bien quand “ce grand type, très brun, avec peu de cheveux, d’une grande prestance mais extrêmement gentil, venait à la maison deux fois par semaine. Bien élevé, il posait les questions avec politesse. Il était curieux de tout, il avait le soucis du détail”.
“La grande illusion” relate notamment la vie d’un officier en forteresse et de son évasion. “La première partie est très proche de la réalité quand mon père avait été mis en forteresse à Ingolschadt. L’évasion est l’histoire d’un copain à mon père, Toukatchevsky, devenu par la suite maréchal en chef de l’Armée Rouge et fusillé par Staline en 1939”.
Mme Navières du Treuil est née à Paris alors que son père avait 44 ans puis a perdu sa mère à l’âge de six ans. Aujourd’hui, elle habite Limoges et a spontanément répondu à l’invitation de Maurice Pasquet, président de l’AHMS 338 RIR (Association pour honorer la mémoire des soldats du 33e Régiment d’infanterie de réserve, recruté en août 1914 à Magnac-Laval). C’est un véritable après-midi thématique sur la Grande Guerre qu’a proposé Maurice Pasquet. En première partie, la projection de la vidéo-cassette sur la bataille de Verdun de 1916 a montré les atroces réalités de la guerre. Les commentaires de l’historien Pierre Miquel ont mis l’accent sur le contraste entre, d’un côté le jeu des politiques, les belles paroles patriotiques et, de l’autre, des soldats, français et allemands, voués à un sort horrible.
Le populaire du Centre 23 mai 1998