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Perdu en référé. Perdu en appel. Avant le vrai procès sur le titre ” FN “, Le Pen s’est déjà fait étendre deux fois en justice.

D’abord une gifle, ensuite une claque. Par deux fois, Le Pen a engagé une procédure d’urgence. Pour demander à la justice de lui reconnaître, toutes affaires cessantes, l’exclusivité sur le titre “Front national”. Et, par deux fois, les tribunaux l’ont envoyé bouler.

Il y a trois semaines, un premier tribunal l’avait débouté – en affirmant que les revendications de Charlie et des anciens du réseau de résistance Front national étaient aussi recevables que les siennes.

Cela aurait pu le calmer. Mais non : têtue, Papy-FN a fait appel de cette décision. Et, une nouvelle fois, il s’est pris une beigne. Un peu plus sèche, un rien plus craquante. La semaine dernière, la cour d’appel a en effet “sursis à statuer” – en attendant une décision du “juge du fond”.

Bref : les juges, saisis par une procédure d’urgence, ont gentiment demandé au vieux facho d’arrêter de leur brouter l’hermine. Et lui ont conseillé d’aller cuver son ulcère, le temps qu’un vrai débat juridique ait lieu sur la propriété du titre “Front national”. Deux défaites en un mois. Ce n’est déjà pas si mal. Mais rien n’interdit de penser que Le Pen puisse faire mieux.

Le 30 mars, en effet, aura lieu le vrai procès, sur le fond. La vraie bataille. Ce jour-là, la justice devra véritablement dire à qui appartient l’appellation “Front national”. Et Le Pen (comme Mégret) risque d’être déçu.

Le 18décembre dernier, Charlie a en effet déposé cette marque à l’Institut national de la propriété industrielle (INPI). Avant d’en partager la propriété avec les anciens résistants du mouvement “Front national”. Serge Martinez (mégrétiste) a bien prétendu avoir agi de même – avant Charlie. Mais l’INPI s’est contenté de publier les deux dépôts de marque, comme si de rien n’était.

Sur ce plan, les fachos sont mal partis.

Surtout, le mouvement de résistance Front national existe depuis 1941. Il est toujours représenté par un “liquidateur national”, nommé par le ministère de la Défense. Et il a donné naissance , dès 1945, à une association légalement déposée (également intitulée “Front national”).

Juridiquement, Le Pen comme ses “félons” auront du mal à plaider l’antériorité. Surtout, ils auront les plus grandes difficultés à revendiquer, devant les tribunaux, un titre appartenant à l’histoire de la Résistance – alors qu’en juillet dernier la Cour de cassation a jugé qu’on pouvait légitimement les traiter de “fils spirituels de Hitler“…

François Camé et Anne Kerloc’h, Charlie Hebdo du 17 février 1999.

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